OUI, pour un véritable internationalisme en actes !

Publié le par FSC

A quelques jours de distance et à quelques encablures de l'ouverture du 52e congres de la CGT, plusieurs dirigeants de la CGT dont d'ex confédéraux comme Bernard Thibault et Jean-Louis Moynot se sont exprimé en particulier sur les enjeux internationaux et les appartenances internationales de la CGT et récemment dans le document :

"Pour un internationalisme en actes !".

C'est un signe fort !
Et nous ne nous plaindrons pas qu'après des années de silence sur ces questions le débat débouche sur l'espace public militant.

Encore faut-il qu'il ne soit pas biaisé!

Car de quoi cette intervention est-elle le signe?


Jusqu'ici depuis de très nombreuses années ces questions n'étaient pas abordées du moins en direction des militants et les choses semblaient aller de soi et ne devaient pas faire l'objet d'une discussion ou d'un bilan : dans les années 90 les dirigeants d'alors avaient fait le choix de quitter la Fédération Syndicale Mondiale, la FSM, avaient procédé à l'adhésion à la Confédération Européenne des Syndicats (CES) puis plus largement en 2006 à la Confédération Syndicale Mondiale (CSI) dont ils avaient accompagné la création.
Alors qu'est-ce qui motive ce soudain intérêt et cette soudaine expression ?
Et si précisément ces choix n'allaient pas de soi et pouvaient faire l'objet d'un réexamen à la lumière de l'actualité et de l'expérience de plus de 20 ans ?
Et cette confrontation aurait-elle lieu si de plus en plus d'organisations de la CGT, de militants n'avaient formulé des critiques sévères à l'égard de l’immobilisme notamment de la CES, sa dépendance des institutions européennes et si plusieurs grandes structures n'avaient dors et déjà adhéré à la FSM?
Autrement dit les tenants du statu quo au plan international sont inquiets, ne peuvent plus faire comme si le débat sur cette question n'existait pas et en conséquence multiplient les déclarations accusatrices afin de tenter d'éteindre une réflexion en profondeur.
Tout en continuant à refuser de la mettre à l'ordre du jour des instances et des congrès!

Le plus récent texte de ce début mai (voir ci-après)  "Pour un internationalisme en actes!"

- qualifie de mythique la vision de ceux qui prônent une adhésion à la FSM et de nostalgiques dépassés ceux qui sont sensibles à cette préoccupation.

- reconnait de grosses  insuffisances à la CES et la CSI

- mais réserve ses principaux coups à la FSM globalement désignée comme étrangère "à nos valeurs" sans cependant écarter de s'adresser (pas de se concerter) aux syndicats affiliés à la FSM dans des " initiatives d'action de luttes coordonnées" à l'échelle internationale
- se prononce pour une approche qui exige " des évolutions démocratiques et des méthodes d'action de la CSI et de la CES".

L'adhésion de la CGT à la CES


Cette approche des questions, des alliances et des appartenances internationales mérite quelques rectifications et quelques rappels :


1) Ce type d'analyse comme celui de la direction confédérale est muet sur les conditions dans lesquelles s'est faite l'adhésion à la CES dans les années 90.

Il est exact que la CGT demandait son adhésion à la CES dès 1973.

Cette demande se soldant jusqu'au début des années 90 par un refus des dirigeants de la CES ET des autres dirigeants des syndicats français (FO, CFDT) au nom de l'incompatibilité des "valeurs" de la CGT avec celles de la CES et de ses organisations.

Qu'est-ce qui rend donc possible dans les années 90 ce qui ne l'était pas dans les années 70 ?

Est-ce que c'est la CES qui a changé ou plutôt la CGT dont les valeurs sont devenues brusquement compatibles avec celles de la CES?

Les faits ne souffrent pas d’ambiguïté : ce sont les dirigeants de la CGT qui ont changé et qui en 92-99, dans un moment de désarroi idéologique, ont accepté les conditions imposées par la CES pour y adhérer : acceptation du "dialogue social", de la signature des accords avec le patronat,  du "syndicalisme rassemblé" avec une CFDT recentrée, des institutions européennes et de l'Union européenne comme horizon indépassable devant seulement faire l'objet de la revendication d'une "Europe sociale" sans cesse invoquée, arlésienne d'un internationalisme rabougri et vidé de son contenu de classe, et ... départ la Fédération Syndicale Mondiale (FSM).

Ce virage fondamental étant souligné par contraste par la position de la CGT jusque là d'opposition radicale au marché commun (époque Benoît Frachon) et de l'UE définis comme un « instrument antinational et antisocial au service des trusts ».

Et par Henri Krasucki en 1991, alors secrétaire général qui dans la continuité des demandes de 1973 mettait en garde en répondant aux partisans de l'abandon de tous principes :


« Ne jamais renoncer à un devoir international mondial, même complexe, dans l'espoir, d'ailleurs illusoire, d'être admis dans une organisation ouest européenne qui boycotte la CGT, non pour son adhésion à la FSM, mais parce qu'elle est la CGT, par anticommunisme, sur des bases politiques et idéologiques. Une question de dignité et d'efficacité »

Oui jusqu'au début des années 90 les dirigeants de la CES et ceux des syndicats français ont boycotté la CGT pour des raisons de classe et par anticommunisme, par soumission à l'impérialisme.

Et dans les années 90-99 c'est l'acceptation de leurs conditions humiliantes par les dirigeants de l'époque, Louis Viannet en tête suivi de Bernard Thibault qui explique la porte ouverte pour entrer dans le club réformiste et pro occidental.

Voilà la réalité de l'histoire de l'adhésion de la CGT à la CES.
Voilà aussi pourquoi les dirigeants confédéraux refusent de faire un bilan de cette adhésion depuis cette période!

2) Les auteurs du texte sont aussi muets sur les conditions d'adhésion à la CES parce que leur position repose sur un mensonge reconduit depuis plus de 25 ans et repose donc sur un DENI : l'orientation confédérale de la CGT serait resté fidèle à un positionnement de classe dans la continuité de ses positions depuis que le courant révolutionnaire l'a emporté sur le courant réformiste.

Et la CES et la CSI n'auraient quasiment aucune influence sur la détermination des prises de position confédérales.

ALLONS DONC !

TOUT SIMPLEMENT, CELA EST FAUX.

C'est faux comme on a pu le constater en 2005 quand Bernard Thibault a tenté de neutraliser le NON de la CGT au traité constitutionnel européen pour se trouver en phase avec le OUI de la CES.

C'est faux en matière de perspective de changement de société où l'exigence d'une appropriation collective des grands moyens de production et d'échange, clé de voûte d'une véritable transformation révolutionnaire a été remplacée statutairement dès le 45e congrès par une vague action "pour une société démocratique, libérée de l’exploitation capitaliste" sans précision cette fois sur les conditions nécessaires à cette libération .

Parce que fondamentalement pour être admis dans le club des gagnants de la guerre froide, partisans du libre marché et de la propriété privée lucrative des moyens de production, il fallait donner des garanties ... réclamées par la CES notamment dont les statuts se contentent de se prononcer pour "la démocratisation de l'économie". Autrement dit en inscrivant son action dans le cadre considéré comme indépassable de l'économie de marché, c'est-à-dire en approuvant le cadre capitaliste.

Une dérive vers le NI-NI "anti-impérialiste"

C'est faux en matière de lutte pour la paix où dans plus d'un cas, dans plusieurs des conflits où l'Occident est engagé la direction confédérale s'est effectivement trouvé en phase avec l'idéologie commune à la CES et la CSI comme avec les tenants de l'ingérence au nom "des droits de l'homme" masquant les véritables motifs des interventions impérialistes.

C'est ainsi, que dans "Activités internationales de la CGT" N° 32, 1er trimestre 2019, document rendant compte du congrès de la CSI qui s'est tenu à Copenhague en décembre 2018, on peut lire :

"À l’heure où les attaques des Trump, Poutine et Jinping contre les traités internationaux et plus largement contre l’ONU et ses organisations, commencent à ébranler le système multilatéral, il est clair que seul ce cadre-là permettra  de  régler  pacifiquement les grandes questions auxquelles l’humanité est confrontée"

Responsabilités partagées dans la mise en cause du multilatéralisme ?  Position aberrante quand on connaît l'idéologie et les pratiques de l'impérialisme US, sa prétention à l'hégémonie mondiale, ses diktats extra-territoriaux y compris à l'égard de ses prétendus alliés (demandez à PSA, à Total, à Alstom) comme on peut le constater à présent avec le Venezuela, avec l'Iran, avec Cuba, le déploiement de son armada militaire partout dans le monde prête à toutes les interventions, ses entreprises de déstabilisation échelonnées sur des dizaines d'années ?
Avec le chaos qui en est résulté en Afghanistan, en Irak, en Lybie, en Syrie, au Yemen reposant sur une alliance de fait avec les soutiens et les propagateurs du terrorisme islamiste comme l'Arabie saoudite et le Qatar!

Tandis que le multilatéralisme est effectivement défendu par des régimes aussi différents que ceux de Russie, de Chine, d'Iran et que de nombreux peuples se battent pour le contrôle de leurs ressources confrontés précisément aux ingérences occidentales.

Cette approche n'a rien à voir avec l'appréciation sur ces régimes eux-mêmes mais se trouve en conformité avec les règles internationales de non  ingérence, de respect de l'indépendance des états et de la nécessité de laisser les peuples fixer leur propre destin! 

Condamner "LES" impérialismes comme co-responsables du chaos actuel c'est exonérer l'impérialisme constitutif de la phase actuelle du capitalisme de ses écrasantes responsabilités sur la situation actuelle du monde!

Ce qui menace la paix du monde de l'Amérique latine à l'Asie en passant par le Moyen orient c'est la politique de l'impérialisme et plus particulièrement de l'impérialisme dominant, l'impérialisme américain qui ne connaît pas d'alliés mais seulement des vassaux à commencer par la France et l'Union européenne, toujours empressées de satisfaire ses exigences.

Et c'est cette attitude du NI-NI et du renvoi des responsabilités dos-à-dos qui explique l'absence confédérale dans le combat contre les mensonges qui accompagnent les préparations de guerre et les guerres elles-mêmes avec la fabrique des prétextes pour les justifier auprès de l'opinion.
Souvenons nous du mensonge à l'ONU sur l'existence des armes de destruction massive de Saddam Hussein.
Mais c'est dans toutes les guerres engagées par l'Occident que la propagande de ses médias se déploie dans nos pays sans s’embarrasser d'exactitude, de vérification des accusations comme on a pu le constater pour la Lybie, la Syrie mais aussi l'Ukraine où un coup d'état de type fasciste avec présence de néonazis a été maquillé en lutte pour la démocratie et la liberté avec soutien avéré et des Etats-unis et de l'Union européenne accompagné du massacre de militants syndicalistes à la Bourse du travail à Odessa le 2 mai 2014 et dont c'est le cinquième anniversaire.

Et qui a dénoncé l'accord conclu avec l'Iran sur le nucléaire détendant les tensions dans la Région, offrant la perspective d'une amélioration de la situation économique des populations, des échanges économiques y compris avec les entreprises françaises et donc bonnes pour l'emploi?
Débouchant à présent sur un risque de  relance de la course aux armements y compris nucléaires et faisant croître considérablement les dangers de conflit régional voire mondial!

C'est le suivisme de ces propagandes qui freine considérablement la mobilisation populaire afin d'intervenir pour le règlement pacifique des conflits et s'opposer à la marche à une guerre généralisée qui menace le sort même de l'humanité.

Et c'est la perte des repères de classe à l'international qui explique le décollage des réalités profondes et des enjeux de notre époque.

Oui il est plus que temps que le débat s'ouvre en grand dans la CGT à l'occasion de son très proche congrès sur ses appartenances et ses engagements internationaux, en partant d'abord de l'appréciation de la crise profonde du système capitaliste, de l'état du monde réel et des responsabilités essentielles de l'impérialisme AU SINGULIER !

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Le document "Pour un internationalisme en actes !"

 

LE DOCUMENT JOINT

Publié dans CGT 52e CONGRES

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